NOCES
Note pour une feuille de salle
Mes Noces sont rouges, violentes. En puisant au texte russe écrit et mis en musique par Stravinsky, j’ai trouvé le récit d’un rite aussi ancien et barbare que le fameux Sacre du Printemps de 1913. La forme des Noces (1913 à 1923) est certes plus raffinée, plus sophistiquée, son langage musical est plus complexe et moins brut que celui du Sacre mais le thème reste fondamentalement celui d’un sacrifice originel, ici le sacrifice de la virginité. Nous assistons à ce rite de passage clef des sociétés traditionnelles qui sépare la jeune fille de ses parents pour l’associer à un mari qu’elle ne connait guère, une violence sociale admise par tous. Dix ans après les Noces, Federico García Lorca reprendra le thème de cette fatalité ancestrale
qui hante les familles, dans ses Noces sanglantes (1932).
J’ai placé l’action de ce ballet dans le vingtième siècle de nos mémoires, celui qui surgit quand nous ouvrons l’album des photos de familles. A travers ces images jaunies ou ces polaroïds flous, on reconnaît des personnalités, des visages, des attitudes qui ont traversé le temps. La noce rassemble, à chaque génération, son cortège de portraits archétypaux. Toutes et tous arrivent parfaits pour la cérémonie, et dévoilent au fur et à mesure de la soirée des failles, des faiblesses ou des tares qui finalement nous surprennent peu car nous en partageons, nous aussi, l’héritage.
Suivant la logique de la trace et de la mémoire, ma chorégraphie est composite et voyage dans le vingtième siècle. Incarnation de multiples époques et situations, la danse anime les personnages ; c’est elle qui procure une âme aux photos de l’album que nous avons ouvert ensemble. Ainsi le premier tableau rend hommage à Nijinska, dont la science des poses et des attitudes pareilles aux images byzantines a fixé à jamais les images de la création. A l’opposé, le quatrième tableau s’inspire de mes « boums » de jeunesse qui étaient rythmées par le redoutable madison
ou l’inévitable slow.
Un travail approfondi autour de la partition musicale m’a amené à penser l’œuvre scénique de façon globale, sans séparer les musiciens des chanteurs ou des danseurs. Tous sont protagonistes du drame. Tous participent à faire avancer l’action et créer les émotions. Un personnage comme celui de la mère de la mariée s’exprime à la fois dans les voix et bien sûr dans le corps d’une danseuse. En mettant en lumière les correspondances entre le propos musical et le propos chorégraphique, j’aimerais amener ces Noces vers la forme d’un opéra dansé,
d’un ballet chanté.
Mais, trêve de bavardage, il est l’heure de nous préparer pour ce grand jour. Nos plus beaux habits sont prêts. Les mariés, leurs familles et leurs amis s’affairent.
Ils sont en scène et nous attendent.
Générique
Conception / réalisation chorégraphique et mise en scène
Aurélien RICHARD
Interprétation
Justine AGATOR
Pauline BALAYILA
Paulin BANC
Aïda BEN HASSINE
Joséphine BOIVINEAU
Elliot CHASSIN
Elie FICO
Alejandra ESCOBAR
Evan LOISON
Mathilde MAIRE
Elisa MANKE
Lucian MERCIER
Maëlle PROVOST
Victor THIEFIN-RICORDEL
Nina TOURTE
Elie TREMBLAY
Jon VERNIER BAREIGTS
Musique
Igor Stravinsky
Direction musicale : Rémi Durupt
Artistes lyriques du Théâtre Bolchoï de Minsk. Chœur et pianistes d’Angers Nantes Opéra (Direction Xavier Ribes), étudiants pianistes du Pont Supérieur (Pôle d’enseignement Supérieur Spectacle vivant Bretagne – Pays de la Loire), étudiants percussionnistes du Pôle Aliénor Musique-Danse de Nouvelle-Aquitaine et Tours.
Assistants chorégraphiques et en notation Laban
Vincent Delétang, Laura Dat-Sénac, Yohann Baran, Maud Pizon
Lumière
Gilles Richard
Costumes et maquillage
Sylvain Dufour
Co - Production
Angers-Nantes Opéra, CNDC – Angers, en partenariat avec Musique et Danse en Loire-Atlantique, l’Opéra de Rennes et LIMINAL
Quelques images de répétitions en costume, par Régine Lemarchand.